Pour la Journée internationale des femmes 2020, nous avons publié sur les médias sociaux une série de sept graphiques (Facebook, Twitter, LinkedIn, Instagram) qui illustrent la situation des femmes surtout au Québec, mais aussi au Canada et ailleurs.
Comme nous le faisons parfois, nous vous présentons ici quelques étapes clés du processus de développement des graphiques. Nous avons choisi trois graphiques parmi les plus complexes, tous développés avec Excel, même si certains graphiques dans la série originale ont été faits avec Datawrapper.
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Nous avons choisi le thème environ un mois à l’avance et avons fait de la recherche à l’Institut de la statistique du Québec et chez Statistique Canada. Nous avons établi la limite d’âge des données à cinq ans ou moins.Graphique 1 : Le revenu en fonction du niveau de l’éducation
Nous sommes tombés sur ce graphique publié dans un rapport de l’Institut de la statistique du Québec (Niveau de scolarité et revenu d’emploi, 2018, Figure 1). Ces données suggèrent une étonnante différence de revenus entre les hommes et les femmes. Par contre, le graphique rend cette comparaison difficile pour chaque niveau d’éducation car les barres pour chaque sexe sont loin l’une de l’autre. De plus, les niveaux de scolarité sont représentés par une légende qui n’est pas nécessairement intuitive, plutôt que de les étiqueter directement. Nous avons donc esquissé quelques idées de graphiques qui permettraient de comparer plus facilement les femmes aux hommes. Graphique à haltères (dumbbell) Graphique à pentes Coordonnées parallèles: Un point par niveau de scolarité Les deux premières esquisses présentent les données clairement, mais en plus la troisième — les coordonnées parallèles — offre une belle opportunité d’avoir un visuel moins typique. Dans cette première version (ci-dessous) il est possible comparer les revenus des femmes (rouge) à celui des hommes (bleu) pour le Canada (lignes en gras) et pour quelques provinces. Ce projet nous a donné la chance d’appliquer la nouvelle identité de Voilà:. Ci-dessous, une version intermédiaire avec les couleurs et fontes Voilà:. Le graphique se concentre sur la situation au Québec et les lignes de grille verticales attirent l’attention sur les catégories. Ces lignes pourraient aussi clarifier que chaque niveau de scolarité est un cas différent et que le graphique ne représente pas le même groupe de personnes qui évolue à travers le temps. Après quelques ajustements pour améliorer le visuel, voici la version finale. Les titres des axes sont en haut pour qu’on les voit immédiatement. Représenter les données avec des marqueurs carrés renforce encore plus le fait que le graphique compare 4 populations différentes. Données : Statistique Canada, Recensement en bref : La scolarité est‑elle payante? Une comparaison des gains selon le niveau de scolarité au Canada et dans ses provinces et ses territoires, Tableau 1.Graphique 2 : Le revenu selon l’industrie
Les données révèlent que les femmes gagnent moins que les hommes dans presque toutes les catégories d’emploi. Nous pouvons visualiser cette différence avec un nuage de points. Une ligne diagonale à quarante-cinq degrés met l’emphase sur l’égalité salariale hommes-femmes. Cette esquisse a été faite au tableau lors d’une discussion initiale sur la façon de représenter ce fait. Voici une version intermédiaire avec les vraies données : Seules quelques industries aux extrémités sont étiquetées (plus petite et plus grande différence hommes-femmes). La tendance est visible, mais il n’est pas possible d’y explorer tous les données. La définition de chaque axe est communiquée par les couleurs dans le titre et les axes, ce qui nécessite plus d’effort à comprendre que d’étiqueter les axes directement. La version finale permet l’exploration de tous les données. Les points ronds ont également été remplacés par des carrés, plus conformes à notre image de marque. On remarque aussi plusieurs petits ajustements, comme l’alignement du titre, la couleur des étiquettes, la taille du texte des axes et la mise en forme des notes en bas de page. Données : Statistique Canada, Salaires des employés selon l’industrie, données annuelles, salaire horaire médian, travailleurs à temps plein, 15 ans et plus.Graphique 3 : Heures de travail rémunérés et non rémunérés
Ci-dessous, une visualisation proposé par Statistique Canada montre la distribution typique des heures de travail rémunérés et non rémunérés pour les femmes et les hommes dans différents pays. Cette représentation rend la comparaison difficile. Les colonnes empilées et également espacées empêchent de bien comparer la hauteur des barres vertes pour un pays en particulier, pour les femmes, etc. Comme il s’agit d’une représentation de deux variables (heures rémunérées et heures non-rémunérées), nous pouvons faciliter la comparaison en représentant les données avec un nuage de points. Chaque pays est représenté par deux points — un pour les femmes, un pour les hommes — reliés par une ligne. Initialement, nous avons considéré un nuage de points qui montrait le total d’heures travaillées pour souligner que les femmes ont tendance à travailler plus d’heures que les hommes. Par contre, il pouvait être difficile de comprendre qu’une des deux variables (pourcentage d’heures non-rémunérées) était un sous-produit de l’autre (heures travaillées). Finalement, nous avons décidé qu’il était plus intuitif de comparer les heures rémunérés avec les heures non rémunérés. La version finale ajoute des lignes diagonales pour souligner que les points sur une même diagonale ont travaillé le même nombre d’heures en total. Les femmes au Canada sont donc celles qui travaillent le plus à chaque jour, toutes catégories confondues. Notre refonte est définitivement plus intimidante que la version originale à première vue. Mais cette nouvelle version récompense l’effort et permet de faire voir des détails analytiques intéressants. Par exemple, on voit maintenant que les hommes dans tous les pays représentés font une quantité similaire de travail non rémunéré (alignement horizontal de carrés noirs), sauf au Japon. Données : Statistique Canada, Emploi du temps : la charge de travail totale, le travail non rémunéré et les loisirs, 2018, Graphique 2.En commun à tous les graphiques
Chaque graphique a un titre qui communique son message principal. Des détails pertinents sur les données (population, critères de sélection, année, etc.) sont indiquées dans le sous-titre ou en bas du graphique. Comme les graphiques sont publiés sous forme d’images et que l’on ne peut mettre d’hyperliens, nous avons mis suffisamment de détails dans la description de la source pour pouvoir facilement retrouver les données d’origine sur Internet. Ce genre de transparence est important pour un sujet qui soulève beaucoup de questions, surtout pour des graphiques qui pourraient être diffusés sans contexte.Et ensuite ?
Considérant la complexité des facteurs qui influencent l’inégalité, il n’est pas surprenant que cette série de graphiques soulève plus de questions qu’elle n’y répond. Nous espérons que ces visualisations piquent la curiosité des gens et les encouragent à chercher des réponses à leurs questions. Un bon point de départ serait le rapport fascinant (vraiment!) de Statistique Canada sur l’emploi du temps.Ce billet a été retenu dans le best of visualisation web de avril 2020.
Erica conçoit, développe et propose des améliorations de visualisation de données. Elle rédige également des articles analytiques sur le design d’information et planifie des événements chez Voilà, en plus d’aider à structurer les méthodes de l’équipe par la formalisation de processus de travail.